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24 juillet 2025

Newsletter de l’été

IA

➡️ Deepfakes et arnaques IA : le Gouvernement danois serait en passe d’accorder à ses citoyens un droit d’auteur sur notre voix, notre image, notre identié !

Dans un contexte d’essor rapide de l’intelligence artificielle, le Danemark s’apprête à devenir le premier pays européen à reconnaître un droit d’auteur sur l’image, la voix et l’apparence physique de chaque individu.

🔵Objectif affiché : lutter contre la prolifération des deepfakes, notamment à caractère sexuel ou diffamatoire.

🔵Concrètement :

  • Elle permettrait selon à toute personne de demander le retrait de contenus « deepfake » sur les plateformes en ligne et de réclamer des indemnisations.
  • Les plateformes qui ne coopèrent pas s’exposeraient à de lourdes amendes.
  • En cas de non-respect, les autorités danoises pourraient saisir la Commission européenne, habilitée à sanctionner sur la base de la législation européenne.
  • Les parodies et satires resteraient toutefois autorisées afin de protéger la liberté d’expression

Ce projet de loi intitulé « Projet de proposition de loi visant à modifier la loi danoise sur le droit d’auteur » (Udkast til forslag til lov om ændring af lov om ophavsret), déposé par Le ministère de la Culture danois vise à encadrer plus strictement l’usage abusif de l’intelligence artificielle dans la création de contenus falsifiés. Sous réserve de son adoption par le Parlement, cette législation entrerait en vigueur le 31 mars 2026. L’initiative, soutenue par une large majorité parlementaire, répond à un besoin croissant de régulation dans un monde où la génération d’images fausses est de plus en plus simple et rapide.

📣 Parole d’expert FIRSH : Le Danemark envisage donc d’adopter une loi pionnière pour protéger juridiquement l’apparence physique contre les deepfakes, sous l’angle inédit du droit d’auteur. En érigeant explicitement ces attributs biométriques en expressions juridiquement protégées, le projet s’écarte donc des fondements traditionnels du droit d’auteur — historiquement limité à la protection des œuvres de l’esprit — pour intégrer l’identité personnelle dans le champ élargi de la propriété intellectuelle. Notre identité serait donc transformée en produit dont nous avons la propriété : Cette législation pourrait accélérer la commercialisation de l’identité personnelle, au bénéfice des célébrités, notamment post-mortem. Pour le reste, des infractions existent déjà sur le terrain de la vie privée, de la diffamation ou de l’usurpation numérique et bien d’autres qui devraient surtout déjà être appliquées !

➡️ Disney et NBC Universal attaquent Midjourney : les géants d’Hollywood déclarent la guerre aux IA génératives

Le 11 juin, Disney et NBC Universal ont déposé plainte contre Midjourney, accusant cette dernière d’avoir entraîné ses modèles d’IA sur des œuvres protégées de leurs franchises emblématiques sans autorisation. Ils accusent Midjourney de violation massive du droit d’auteur, en particulier pour avoir généré des images ressemblant fortement à des œuvres protégées issues de leurs franchises (comme Star Wars ou Les Minions), sans autorisation.

⚖️ Les accusations principales :

  • Utilisation illégale de contenus protégés pour entraîner l’IA de Midjourney.
  • Création d’images générées qui imitent des personnages, décors ou styles visuels appartenant à Disney et Universal.
  • Responsabilité directe de Midjourney, malgré leur défense selon laquelle seuls les utilisateurs sont responsables des images générées.

💰 Ce que réclament Disney et Universal :

  • 300 millions de dollars de revenus que Midjourney aurait générés grâce à leurs propriétés intellectuelles.
  • 150 000 dollars par œuvre violée en dommages et intérêts.
  • Une interdiction d’utiliser ou de reproduire leurs œuvres à l’avenir.

🌐 Enjeux plus larges :

Ce procès pourrait devenir un précédent juridique majeur dans le domaine de l’IA et du droit d’auteur. Il soulève des questions fondamentales :

  • Peut-on entraîner une IA sur des œuvres protégées ?
  • Qui est responsable des créations générées par IA ?
  • Comment protéger les artistes et studios face à l’automatisation créative ?

Les contentieux liés à l’entraînement des IA génératives sur des contenus protégés se multiplient en effet aux États-Unis. Si aucun jugement sur le fond n’a encore été rendu, les tribunaux fédéraux commencent à examiner de près la portée du fair use et à se pencher sur un enjeu juridique central : l’existence ou non d’un marché de licences pour les données d’entraînement.

Ce point est devenu un élément stratégique dans la défense des développeurs d’IA qui s’appuient sur la théorie du fair use, une exception au droit d’auteur américain. Pour rappel, les juges américains doivent apprécier le « fair use » selon quatre critères,

Les quatre critères du « fair use » (usage équitable) sont des éléments utilisés dans le droit américain pour déterminer si l’utilisation d’une œuvre protégée par le droit d’auteur peut être faite sans autorisation du titulaire des droits. Voici ces critères :

🎯 1. Le but et le caractère de l’utilisation : Est-ce à des fins éducatives, critiques, journalistiques, de recherche ou de parodie ? L’utilisation est-elle commerciale ou non lucrative ?L’œuvre a-t-elle été transformée (ajout de commentaires, d’analyse, etc.) ou simplement copiée ?

📚 2. La nature de l’œuvre protégée : L’œuvre est-elle factuelle (comme un article scientifique) ou créative (comme un roman ou une chanson) ? Les œuvres plus factuelles sont plus susceptibles d’être utilisées équitablement.

📏 3. La quantité et la substance de l’œuvre utilisée : Quelle proportion de l’œuvre originale est utilisée ? Est-ce une petite portion ou une partie essentielle (le « cœur » de l’œuvre) ? Même une petite portion peut poser problème si elle est jugée essentielle.

💸 4. L’effet de l’utilisation sur le marché potentiel de l’œuvre : L’utilisation nuit-elle à la valeur commerciale de l’œuvre originale ? Peut-elle remplacer l’œuvre originale sur le marché ?

Ces critères sont évalués ensemble, au cas par cas, par les tribunaux. Aucun critère n’est déterminant à lui seul.

🔵Le cœur du débat : peut-on concéder des licences pour des données d’entraînement ?

Dans ce type d’affaire, les développeurs d’IA soutiennent qu’en l’absence de marché structuré pour la licence de données d’entraînement, aucun préjudice économique ne peut être établi.

🔵Une position de plus en plus contestée…

La défense fondée sur l’absence de marché des licences s’affaiblit, car plusieurs ayants droit, comme le New York Times ou l’Associated Press, ont déjà conclu des accords  rémunérés encadrant l’utilisation de leurs contenus pour l’entraînement des IA.

Et cela change tout : s’il existe, ne serait-ce que partiellement, un modèle économique basé sur la cession de droits pour l’entraînement, alors un usage non autorisé pourrait être considéré comme portant atteinte à ce marché potentiel. Cela affaiblit donc la défense tirée du fair use.

🔵L’avis du Copyright Office

Le débat est d’autant plus sensible que le U.S. Copyright Office lui-même encourage, depuis plusieurs mois, les développeurs d’IA à explorer des solutions de licences lorsqu’elles sont disponibles.

📣 Parole d’expert FIRSH : Face à la multiplication des usages non autorisés d’œuvres protégées par les IA génératives, le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA), dans son dernier rapport publié le 2 juillet 2025, et le Sénat dans son rapport sur la création et l’IA publié le  10 juillet 2025  proposent touts deux  la mise en place d’un véritable marché de licences pour l’utilisation des contenus à des fins d’entraînement.

Objectif : assurer la protection du droit d’auteur et garantir une juste rémunération des créateurs, tout en encadrant juridiquement l’accès aux données pour les acteurs de l’IA.

Chez FIRSH, nous accompagnons des auteurs, artistes-interprètes et ayants droit dans la négociation, la structuration et la sécurisation juridique de ces licences, à l’intersection du droit d’auteur et de l’innovation technologique mais aussi des développeurs d’outils IA qui ont choisi de rémunérer pour plus de fiabilité, de transparence et d’éthique les artistes. L’IA de confiance qui sécurise aussi l’entrainement de leurs outils IA permettra l’arrivée d’outils IA encore plus performants et non biaisés !

Pour en savoir plus 👉 Disney and Universal Sue Midjourney: Navigating AI Copyright Challenges and Fair Use Implications | ArentFox Schiff

Lien vers l’assignation 👉  https://www.documentcloud.org/documents/25972151-disneynbcu-v-midjourney/

➡️ Article 4 du Règlement sur l’IA :  la Commission européenne a apporté des précisions

La Commission européenne a récemment publié une FAQ dédiée à l’article 4 du Règlement IA, précisant les exigences en matière de compétence en intelligence artificielle.

🔵 L’objectif : renforcer la culture IA dans les organisations, au-delà des simples modules de sensibilisation.

Depuis le 2 février 2025, l’article 4 impose aux développeurs, déployeurs, utilisateurs et prestataires de systèmes d’IA de maîtriser les systèmes qu’ils conçoivent ou utilisent, selon leurs responsabilités respectives. Cette exigence ne se limite pas aux systèmes à haut risque : elle s’applique dès lors qu’un système peut affecter des droits, la sécurité ou l’accès à des services essentiels.

🔵 Les clarifications apportées par la FAQ

  • La maîtrise de l’IA repose sur des compétences, pas uniquement des connaissances. Les personnes concernées doivent comprendre les capacités, les limites et les risques des systèmes qu’elles manipulent.
  • La formation doit être différenciée selon les rôles. Développeurs, opérationnels, responsables juridiques ou métiers : chacun a besoin d’un niveau d’expertise spécifique.
  • Les obligations s’étendent aux tiers. Prestataires et sous-traitants doivent aussi être formés, pas seulement les équipes internes.
  • Il faut cartographier les rôles, responsabilités et niveaux d’exposition au risque. L’approche doit être adaptée, fondée sur une analyse concrète des usages et des enjeux.

 

🔵 Gouvernance IA : bien plus qu’un programme de formation

La FAQ envoie un signal fort : l’alphabétisation IA devient un pilier de la gouvernance des systèmes, au même titre que la transparence, la sécurité ou l’éthique.

Pour se mettre en conformité, les organisations doivent :

  • Définir des règles de gouvernance internes encadrant le développement et l’usage de l’IA ;
  • Mettre en place des processus d’amélioration continue, pour garantir que les systèmes restent compréhensibles, fiables et alignés sur la réglementation ;
  • Documenter les actions menées, avec des preuves claires de formation, de suivi et de pilotage des compétences IA.

📣 Parole d’expert FIRSH : Le recours aux systèmes d’IA devenant incontournable, il est impératif de s’y former. Sans approche structurée, les organisations s’exposent à des risques juridiques, opérationnels et réputationnels. FIRSH accompagne les développeurs de solutions IA dans leurs conformité à l’IA ACT (même si de nombreuses dispositions ne sont pas encore entrées en vigueur)

Pour en savoir plus 👉 https://digital-strategy.ec.europa.eu/fr/faqs/ai-literacy-questions-answers

 

➡️ Dette cognitive et intelligence artificielle : les enseignements d’une étude neurophysiologique du MIT

Une étude récente du MIT s’est penchée sur l’impact cognitif de l’utilisation d’outils d’intelligence artificielle comme ChatGPT dans le cadre d’un exercice intellectuel.

Objectif : mesurer comment l’assistance technologique influence l’activité cérébrale et la mémoire.

🔵Méthodologie : 54 étudiants, répartis en trois groupes (sans aide, avec Google, avec ChatGPT), ont passé un test de rédaction sous électrodes afin d’analyser leur activité cérébrale.

🔵Résultat principal : les participants ayant utilisé ChatGPT ont présenté une activité neuronale réduite, en particulier dans les zones liées à la mémoire.

  • 83 % d’entre eux étaient incapables de résumer leur propre travail après l’épreuve.
  • Aucun n’a pu citer une seule phrase exacte de sa copie.

L’étude met en lumière ce que les chercheurs appellent une « dette cognitive », liée à la délégation excessive à l’intelligence artificielle. À l’instar de la dépendance au GPS, qui finit par affaiblir notre mémoire spatiale, un recours trop précoce à l’IA pourrait nuire à notre capacité de mémorisation et à l’exercice de l’esprit critique.

Pour en savoir plus 👉 Un monde connecté : podcast et émission en replay | France Culture

DONNEES PERSONNELLES

➡️ Accès aux courriels professionnels : la Cour de cassation étend le droit d’accès des salariés

Dans un arrêt du 18 juin 2025, la chambre sociale de la Cour de cassation affirme que les courriels envoyés ou reçus par un salarié via sa messagerie professionnelle constituent des données à caractère personnel. À ce titre, l’employeur est tenu d’en fournir une copie intégrale, y compris les métadonnées (horodatage, destinataires), sauf atteinte aux droits et libertés d’autrui.

Cette décision marque un tournant : elle valide un usage extensif du droit d’accès prévu à l’article 15 du RGPD, même lorsque ce droit est exercé à des fins probatoires, notamment après la rupture du contrat de travail.

🔵 Plusieurs voix s’élèvent pour dénoncer une interprétation plus large que celle retenue par la CJUE dans son arrêt du 4 mai 2023, aff. C-487/21, F.F. c/ Österreichische Datenschutzbehörde, notamment en ce qui concerne l’obligation de transmettre des courriels dans leur globalité ou les métadonnées associées.

🔵 Un enjeu majeur pour les entreprises : traiter ce type de demandes implique des efforts techniques importants (sélection, anonymisation, contextualisation) et pourrait ouvrir la voie à une judiciarisation accrue du droit d’accès.

Pour lire la décision complète ici 👉 Cour de cassation, Chambre sociale, 18 juin 2025, n° 23-19.022

📣 Parole d’expert FIRSH : Le cabinet maîtrise les enjeux liés à la protection des données personnelles. Nous accompagnons nos clients dans la mise en conformité avec le RGPD, la sécurisation des données collectées, et la gestion des incidents tels que les violations ou fuites de données.

➡️ Le 26 février 2025, la Cour de cassation a rendu deux arrêts importants sur la suppression de contenus diffamatoires en ligne via la procédure accélérée au fond. L’un (n° 23-16.762) concernait des vidéos anonymes sur YouTube, l’autre (n° 23-22.386) des tweets diffamatoires déjà condamnés.

➡️ La première affaire (n° 23-16.762) : vidéos diffamatoires anonymes sur YouTube

Par cet arrêt, la Cour de cassation reconnaît qu’un juge peut ordonner à un hébergeur la suppression de contenus diffamatoires publiés sous couvert d’anonymat, même en l’absence de débat contradictoire avec l’auteur, à condition que le contenu soit manifestement illicite.

L’affaire opposait plusieurs personnalités monégasques à Google Ireland, après la publication sur YouTube de vidéos anonymes les accusant gravement. Faute d’identification de l’auteur malgré une plainte avec constitution de partie civile, les victimes ont saisi la justice selon la procédure accélérée au fond (article 6-I-8 de la LCEN) pour demander la suppression des vidéos et la communication des données d’identification.

🔵 Réponse de la Cour d’appel :

Elle a débouté les plaignants, estimant que, sans contradictoire, le juge ne pouvait se prononcer sur le caractère illicite des propos, et que la seule atteinte à l’honneur ne suffisait pas à caractériser un dommage manifeste. Elle a refusé d’examiner la proportionnalité de la mesure demandée, au motif que les demandeurs n’auraient pas démontré l’impossibilité d’identification.

🔵 Réponse de la Cour de cassation :

La Cour casse l’arrêt d’appel, rappelant qu’un juge peut parfaitement ordonner le retrait de contenus manifestement illicites lorsque l’auteur a volontairement organisé son anonymat (via données fictives et VPN). Elle souligne que la gravité de l’atteinte à la réputation exige une mise en balance effective avec la liberté d’expression.

Elle reproche aux juges du fond de ne pas avoir recherché si la suppression n’était pas proportionnée, compte tenu du fait que l’auteur était injoignable, et que l’hébergeur (Google) ne disposait pas de données d’identification fiables, en méconnaissance de ses obligations légales (article 6-II de la LCEN).

🔍 Focus critique : l’exigence de “dommage manifestement illicite” en question

La Cour conditionne la suppression à un caractère manifestement illicite du contenu, écartant l’idée qu’une simple atteinte à l’honneur suffise. Cette lecture importe les critères de la loi sur la presse de 1881 (preuve de la vérité, bonne foi…) dans une procédure civile censée être autonome. Elle fragilise le recours des victimes en cas d’anonymat, alors même que la LCEN vise à agir en urgence contre l’hébergeur, sans nécessité de qualifier pénalement les propos.

📣 Parole d’expert FIRSH : L’arrêt confirme qu’un hébergeur peut être contraint de supprimer un contenu diffamatoire même sans contradictoire, si l’illicéité est manifeste et si l’auteur se dissimule. Il impose aux juges du fond un contrôle rigoureux de la proportionnalité, pour éviter que l’anonymat ne crée une impunité numérique. Une décision qui ouvre la voie à une meilleure protection judiciaire… tout en laissant persister une incertitude juridique sur la notion de “dommage” au sens de la LCEN.

➡️ La seconde affaire (n° 23-22.386) : réitération de tweets diffamatoires déjà condamnés

Un arrêt récent de la Cour de cassation rappelle que les plateformes numériques ont l’obligation de retirer des contenus diffamatoires déjà jugés comme tels, dès qu’elles en sont saisies. L’affaire concernait un boxeur franco-marocain réitérant sur X (exTwitter) des propos diffamatoires à l’encontre d’un haut fonctionnaire du Royaume du Marco déjà condamnés par la justice.

Estimant que des propos diffamatoires déjà condamnés étaient à nouveau diffusés, la victime a demandé leur retrait à Twitter sur le fondement de l’article 6-I-5 la loi LCEN. En l’absence de réponse satisfaisante de la plateforme, elle a saisi la justice pour obtenir leur suppression, interdire toute republication identique, identifier l’auteur du compte et obtenir réparation.

🔵Réponse de la Cour d’appel :

La Cour d’appel a débouté le plaignant, au motif que la demande ne visait pas directement l’auteur des propos, mais l’hébergeur (ici, X, exTwitter). Selon les juges d’appel, aucun débat contradictoire n’était possible, puisque la responsabilité directe de l’auteur n’était pas en cause dans cette procédure. En l’absence d’un tel débat, la cour a jugé qu’il n’était pas possible d’évaluer la réalité de l’atteinte.

 

🔵Réponse de la Cour de cassation :

La Cour de cassation, saisie par le plaignant, casse l’arrêt d’appel et précise la portée des obligations imposées aux hébergeurs. Elle s’appuie sur les articles 6-I-7 et 6-I-8 de la LCEN, dans leur version modifiée par la loi du 24 août 2021, et sur l’interprétation de la directive européenne « e-commerce » par la Cour de justice de l’Union européenne.

Elle rappelle qu’un hébergeur n’est pas soumis à une obligation générale de surveillance des contenus, mais qu’une juridiction peut parfaitement lui ordonner de supprimer ou de bloquer l’accès à une publication dont le contenu est identique à celui d’un message déjà déclaré illicite (ici, des propos jugés diffamatoires dans une décision antérieure).

Ce blocage ne constitue pas une censure excessive, dès lors que :

  • le contenu visé est strictement identique à celui déjà jugé illicite,
  • l’hébergeur n’a pas à porter d’appréciation autonome sur le caractère diffamatoire des propos,
  • la demande de retrait s’appuie sur une décision judiciaire préalable.

En l’espèce, la cour d’appel aurait donc dû vérifier si les propos diffusés sur le profil Twitter étaient bien identiques à ceux pour lesquels l’auteur avait déjà été condamné, ce qu’elle n’a pas fait.

📣 Parole d’expert FIRSH : Cet arrêt de la Cour de cassation clarifie un point sensible : les plateformes comme X ne sont pas tenues de juger par elles-mêmes ce qui est ou non diffamatoire, mais elles peuvent être contraintes de retirer des contenus déjà reconnus comme illicites par une décision de justice que l’auteur ou non du propos diffamatoire soit atteint à l’instance. Le cabinet FIRSH revient plus en détail sur ce sujet et ses implications pratiques dans son livre blanc.

Pour lire la décision complète ici 👉 Cass. 1ère civ., 26 février 2025, RG n°23-22.386

 

IA & PROPRIETE INTELLECTUELLE 

➡️ PUBLICATION DU RAPPORT SUR LA REMUNERATION DES CONTENUS CULTURELS PAR L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

Le rapport sur la rémunération des contenus culturels par l’intelligence artificielle est publié

Le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA) a publié le rapport de sa mission sur la rémunération des contenus culturels exploités par les systèmes d’intelligence artificielle. Conduit par Alexandra Bensamoun et Joëlle Farchy ce rapport propose une approche croisée, juridique et économique, pour encadrer l’usage des œuvres dans l’entraînement des IA.

🔵 Un constat de départ clair : les systèmes d’IA se nourrissent de vastes volumes de données culturelles, souvent protégées par le droit d’auteur. Si les créateurs peuvent théoriquement s’y opposer via un mécanisme d’opt-out, celui-ci reste aujourd’hui insuffisant pour assurer une protection réelle et une rémunération équitable.

🔵 Le rapport plaide pour plus de transparence sur les sources utilisées, afin de garantir l’effectivité du droit d’opposition et de mieux répartir la valeur générée.

  • Sur le plan juridique, plusieurs leviers sont proposés :
  • la mise en place d’un médiateur de l’IA pour faciliter la négociation entre développeurs et ayants droit,
  • des outils pour renforcer le cadre contentieux, comme la présomption d’utilisation, les actions de groupe ou l’injonction de divulgation de preuves,
  • et une boîte à outils contractuelle favorisant une gestion équitable des droits.
  • Sur le plan économique, le rapport recommande la création d’un marché des licences, fondé sur la négociation, avec des modalités de rémunération proportionnelles ou forfaitaires selon les usages. Cette structuration pourrait s’appuyer sur des intermédiaires techniques et une organisation des contenus pilotée par les titulaires de droits, pour répondre aux exigences de l’écosystème IA.

🔵 Enfin, le rapport insiste sur la nécessité d’associer pleinement les créateurs à la chaîne de valeur, rappelant que les modèles d’IA eux-mêmes dépendent de la richesse et de la diversité des contenus protégés pour maintenir leur pertinence.

📣 Parole d’expert FIRSH : Le rapport du CSPLA marque une étape importante dans la régulation des usages de l’IA face aux droits d’auteur. Il propose des outils concrets pour structurer un véritable marché des licences, conciliant sécurité juridique pour les développeurs et juste rémunération pour les créateurs. Chez FIRSH, nous accompagnons les acteurs de la création et de la tech dans la mise en place de stratégies contractuelles, de mécanismes de traçabilité et de modèles économiques adaptés à l’écosystème IA en pleine mutation.

Pour en savoir plus 👉 https://www.culture.gouv.fr/fr/nous-connaitre/organisation-du-ministere/Conseil-superieur-de-la-propriete-litteraire-et-artistique-CSPLA/travaux-et-publications-du-cspla/missions-du-cspla/le-cspla-publie-le-rapport-de-mission-relative-a-la-remuneration-des-contenus-culturels-utilises-par-les-systemes-d-intelligence-artificielle

➡️ rapport Sénat : « création et intelligence artificielle »

⚠️Le 10 juillet 2025, la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat a rendu public un rapport intitulé « Création et intelligence artificielle : de la prédation au partage de la valeur », issu d’une mission d’information conduite par Laurent Lafon, avec Agnes Evren, Laure Darcos et Pierre Ouzoulias.

Dans le cadre de ces travaux, les rapporteurs dressent un constat sans équivoque : « Les modèles d’intelligence artificielle générative, largement développés par des acteurs extra-européens, se sont nourris d’une masse considérable de contenus culturels, textes, images, sons, vidéos sans autorisation préalable ni rémunération des ayants droit. »

🔍 Face à cette situation qualifiée de « captation gratuite et systémique de la valeur culturelle », les rapporteurs envisagent l’introduction dans le droit positif français d’une présomption d’utilisation des données : en présence d’un faisceau d’indices, il reviendrait aux fournisseurs d’IA de démontrer que leurs modèles n’ont pas été entraînés à partir d’œuvres protégées. Inspirée des travaux de la professeure Alexandra Bensamoun, cette inversion de la charge de la preuve constituerait un instrument juridique structurant pour rétablir l’équilibre entre créateurs et technologues.

🔍 Le rapport envisage également la création d’une taxe assise sur le chiffre d’affaires des acteurs de l’IA, conçue comme un moyen de rééquilibrer les rapports économiques et d’encourager la conclusion d’accords de licence entre les titulaires de droits et les développeurs de modèles.
Le rapport dénonce par ailleurs ce qu’il qualifie d’« insoutenable gratuité des données », fruit d’une absence de régulation combinée à une sous-estimation des enjeux par les filières culturelles elles-mêmes. Il met en garde contre la concurrence frontale entre œuvres humaines et productions générées, qui menace à terme certains métiers créatifs.

🔍 Enfin, les sénateurs appellent à une réponse européenne ambitieuse : construire un modèle de gouvernance de la donnée culturelle, garant du respect des droits, de la souveraineté technologique et de la pérennité de la création.

Sans réaction rapide de l’Europe, les sénateurs alertent sur le fait que l’Europe risque de demeurer « l’idiot utile » d’un ordre numérique imposé de l’extérieur.

Pour en savoir plus 👉 : Création et IA : de la prédation au partage de la valeur – Sénat

 

PROPRIETE INTELLECTUELLE 

➡️Droit des marques : Marque figurative représentant un motif à carreau et désignant notamment les vêtements – Absence de caractère distinctif

Une société allemande, titulaire de marques figuratives représentant un motif argyle (carreau noir traversé de lignes blanches), a assigné en contrefaçon deux sociétés étrangères commercialisant des chaussettes similaires devant le Tribunal judiciaire de Paris. En réponse, les défenderesses ont demandé l’annulation de ces marques pour défaut de caractère distinctif.

Les juges ont donné raison aux défenderesses. Le motif en question, bien que stylisé, est perçu comme un simple décor courant dans le secteur de la mode, et non comme un indicateur d’origine commerciale. Le public pertinent — des consommateurs moyens — n’y verra qu’un motif décoratif banal, même s’il n’est représenté que par un seul carreau.

La demanderesse n’a pas non plus réussi à prouver l’acquisition du caractère distinctif par l’usage. Les éléments fournis (ventes, sondages, présence sur les réseaux sociaux) ont été jugés insuffisants, en particulier pour l’Union européenne, où la preuve doit porter sur l’ensemble du territoire.

🔵 En conséquence :

  • Les désignations françaises et européennes des marques figuratives sont annulées pour défaut de distinctivité en classes 18 et 25 (cuir, vêtements).
  • La déchéance des droits est prononcée pour les classes 3 et 14 (cosmétiques, bijouterie), faute d’usage sérieux.
  • La marque semi-figurative « THE SIGN OF STYLE » est également déchue.
  • Enfin, l’action en contrefaçon est rejetée : les signes en cause présentent une certaine proximité visuelle et conceptuelle, mais l’ajout des éléments verbaux « Burlington » ou « Burlington The Original » dans les marques de la demanderesse suffit à écarter le risque de confusion.

📣 Parole d’expert FIRSH : Cette décision rappelle que les motifs décoratifs classiques du secteur de la mode ne peuvent être monopolisés en tant que marques que s’ils ont acquis un caractère distinctif réel aux yeux du public.

Pour lire la décision complète ici 👉 TJ Paris 19 mars 2025 19/11680

 

➡️Droit des marques : Refus d’une marque de motif ne différant pas de manière significative de la norme et des habitudes du secteur de la maroquinerie

La demande d’extension en France d’une marque internationale constituée d’un motif répétitif tridimensionnel — composé d’éléments en relief de forme triangulaire aux bords arrondis, disposés en quinconce et évoquant des gouttes d’eau ou des grains de maïs — a été rejetée pour défaut de distinctivité. Le signe visait des produits relevant du secteur de la bagagerie et de la maroquinerie.

Conformément à la jurisprudence constante de la CJUE, une marque tridimensionnelle ne peut être enregistrée que si sa forme s’écarte de manière significative des usages du secteur concerné, afin d’être perçue par le public comme un indicateur d’origine commerciale, et non comme un simple ornement.

Ce principe s’applique également :

🔵 aux marques figuratives représentant bidimensionnellement un produit,

🔵 et aux motifs de surface apposés sur des produits, comme en l’espèce.

Or, le motif revendiqué ne présente aucune divergence notable par rapport aux formes communément utilisées dans le secteur de la maroquinerie à des fins purement décoratives. Il constitue une variante banale de textures déjà présentes sur le marché, sans élément suffisamment distinctif pour attirer l’attention du consommateur comme signe d’identification d’une origine.

En conséquence, le caractère distinctif fait défaut, et la marque n’apparait donc pas de nature à permettre d’identifier l’origine commerciale des produits proposés. La protection en France a donc été légitimement refusée.

Pour lire la décision complète ici 👉 Cour d’appel de Paris, pôle 5, 1re ch., 26 mars 2025, 23/13309

 

➡️Droit des dessins et modèles : Originalité des bijoux comportant une tête de serpent pavée de pierres précieuses – Contrefaçon rejetée, mais actes de parasitisme caractérisés

Une maison de joaillerie italienne revendiquait des droits d’auteur sur plusieurs bijoux de sa collection emblématique « Serpenti seduttori », déclinés autour d’une tête de serpent stylisée aux yeux incrustés de pierres précieuses.

🔵  Elle avait assigné en contrefaçon une société concurrente commercialisant des bijoux similaires représentant des serpents, à la fois en ligne et en boutique.

🔵  À titre subsidiaire, elle invoquait également des actes de parasitisme.

La juridiction a reconnu que les bijoux invoqués présentaient une originalité suffisante, fondée sur des choix esthétiques précis traduisant l’empreinte de la personnalité de leur créatrice.

Pour autant, la demande en contrefaçon a été rejetée. Les bijoux litigieux commercialisés par la défenderesse ne reprenaient ni les éléments caractéristiques des bijoux protégés, ni leur combinaison spécifique.

En revanche, la demande au titre du parasitisme a été accueillie. Le serpent est depuis des décennies un signe identitaire fort de la maison italienne, mis en valeur par une communication soutenue, des expositions et des investissements marketing importants. En s’inspirant de manière systématique de cette symbolique dans une série de bijoux sans les copier à l’identique, la défenderesse a cherché à tirer profit de la notoriété et de la valeur économique individualisée de la collection « Serpenti seduttori », sans assumer les efforts d’investissement équivalents.

Elle s’est ainsi placée dans le sillage commercial de la demanderesse, caractérisant un comportement parasitaire fautif, même si le thème du serpent reste, en soi, d’usage libre dans le sect

👉 Cour d’appel de Paris, pôle 5, 2e ch., 31 janvier 2025, 23/05552 et 23/07023

📣 Parole d’experte FIRSH : Le cabinet conseille régulièrement ses clients dans leur stratégie de marques. Nous conseillons et défendons nos clients pour protéger leurs marques, que ce soit lors du dépôt, en cas de conflit, ou pour faire valoir leurs droits face à une contrefaçon ou une contestation.

 

ECOSYSTEME FIRSH

➡️ Plan OSEZ l’IA

Lancement du plan national « Osez l’IA » :

Une initiative inédite pour accélérer l’adoption de l’intelligence artificielle dans toutes les entreprises, quelle que soit leur taille ou leur secteur.

Porté par l’État et un réseau d’ambassadeurs IA sur tout le territoire, ce plan vise à rendre l’IA concrète, accessible et utile pour les PME, TPE et ETI.

Objectif : passer de la prise de conscience à l’action, et faire de l’IA un levier de croissance pour tous.

Pour en savoir plus 👉 Osez l’IA : un plan pour diffuser l’IA dans toutes les entreprises | Ministère de l’Économie des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique

 

ACTUALITES « FIRSH »

➡️Firsh a participé à la  Journée Ambition France Transports : l’IA et les données au cœur des mobilités de demain

Notre associée Claire Poirson a participé lundi dernier à la journée Ambition France Transports au ministère des Transports, invitée par les ministres Philippe Tabarot, ministre chargé des Transports et Clara Chappaz ministre déléguée auprès du ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, chargée de l’Intelligence artificielle et du Numérique, dédiée à l’innovation dans les mobilités.

Organisée autour de tables rondes et d’ateliers collaboratifs, la journée a réuni des experts publics et privés pour imaginer les transports en 2040. Claire Poirson est intervenue dans l’atelier dédié à l’usage de l’IA et des données, aux côtés de grands acteurs du secteur.

🎯 Ambition commune : des données accessibles, encadrées et éthiques, pour alimenter des IA frugales et responsables au service des usagers.

📣 Parole d’experte FIRSH : réguler, ce n’est pas freiner. C’est poser les bases d’une confiance durable entre technologie et société. Chez FIRSH, nous accompagnons cette transition avec une expertise juridique éthique, innovante et engagé.

➡️Firsh a notamment assisté ses clients sur les projets suivants :

🔵Dans le cadre de la protection d’une marque pour une procédure en référé « marque » sur le fondement L716-4-6 du Code de la propriété intellectuelle.

🔵 Dans le cadre d’une mission de conseil auprès d’une entreprise sur la mise en œuvre en France de la directive (UE) 2019/882 du 17 avril 2019, dite « European Accessibility Act », relative aux exigences d’accessibilité applicables aux produits et services.

📢 Pour nous suivre sur LinkedIn et recevoir notre lettre d’information, c’est ici : https://www.linkedin.com/company/firshlaw/  .

📢 Il n’y a pas de collecte directe de vos données personnelles et donc pas d’emailing de la part de Firsh !

 

 

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